>> Mariage et adoption pour les homosexuels : le feu vert des Sages
Le Conseil constitutionnel a entériné le mariage pour tous. Toutefois, s'agissant de l'adoption, il n'a pas reconnu un «droit à l'enfant» et a, au contraire, consacré la valeur constitutionnelle du «droit de l'enfant».
Le Conseil constitutionnel a donné son feu vert à la loi sur le mariage et l'adoption pour les couples homosexuels. Dans une décision rendue vendredi 17 mai dans l'après-midi, les Sages ont jugé le texte conforme à la Constitution. Ils ont considéré qu'aucun «principe fondamental reconnu par les lois de la République» ne s'opposait à la réforme voulue par François Hollande et adoptée par le Parlement. Le Conseil constitutionnel avait été saisi le 23 avril par les parlementaires UMP et UDI, après que le projet de loi eut été définitivement approuvé par l'Assemblée et le Sénat.
«Ce choix du législateur, auquel il n'appartient pas au Conseil de substituer son appréciation, n'est contraire à aucun principe constitutionnel», ont estimé les juges de la rue Montpensier. Réserver le mariage à l'union d'un homme et d'une femme n'est donc pas «un principe fondamental reconnu par les lois de la République», comme l'avaient soutenu les parlementaires de l'opposition.
Adoption: mêmes critères pour les homos que les hétéros
De même, les Sages ont estimé qu'aucun principe à valeur constitutionnelle ne s'opposait au droit à l'adoption pour les couples homosexuels. Les Sages ont cependant émis une importante réserve d'interprétation sur l'adoption. Les juges de la rue Montpensier ont rappelé que la décision d'accorder ou de refuser l'adoption à des candidats devait prendre en compte le seul intérêt de l'enfant. En d'autres termes, le Conseil constitutionnel n'a pas souhaité reconnaître un «droit à l'enfant». Au contraire, les Sages ont consacré la valeur constitutionnelle du «droit de l'enfant». «Le dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 implique le respect de l'exigence de conformité de l'adoption à l'intérêt de l'enfant», ont souligné les Sages. La décision d'accorder ou de refuser l'adoption à des candidats devra respecter les mêmes critères pour les couples hétérosexuels et pour les couples homosexuels.
L'ancien président Valéry Giscard d'Estaing siégeait lors de l'adoption de cette décision historique, sous la présidence de Jean-Louis Debré.
>> PMA, GPA, les mises en garde du Conseil constitutionnel
La PMA est maintenant la principale revendication des associations de défense des droits des homosexuels et la plus grande crainte des opposants à la loi Taubira.
Le mariage pour tous va-t-il entraîner la PMA (procréation médicalement assistée) pour tous? C'est désormais la principale revendication des associations de défense des droits des homosexuels et la plus grande crainte des opposants à la loi Taubira.

À l'origine, les députés PS avaient pourtant prévu d'ouvrir la PMA dans un amendement à la loi sur le mariage. Un amendement finalement retiré en échange d'une promesse du gouvernement d'ouvrir ce dossier dans un second projet de loi sur la famille. «Sans cette mesure, l'égalité ne sera pas complète», défend Nicolas Gougain, porte-parole de l'Inter-LGBT qui regroupe les principales associations lesbiennes, gays, bi et trans.
Un texte incohérent
Les parlementaires de l'opposition, eux, dénoncent un texte incohérent et hypocrite puisqu'il permettra l'adoption d'enfants conçus par PMA ou par GPA à l'étranger. Une fois la loi mariage votée, ils redoutent que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) impose à la France l'ouverture de la procréation médicalement assistée aux couples homosexuels.
Jusqu'à présent, François Hollande a fait preuve de plus de réticences que d'enthousiasme sur ce sujet, rappelant au passage que ses engagements de campagne se limitaient au seul mariage. La forte mobilisation des «anti» mariage pour tous a-t-elle eu raison de la PMA pour tous? La question ne semble pas tout à fait réglée. Parmi les ministres, les avis sont partagés. «La demande de PMA pour tous est légitime», a lancé la ministre de la Justice Christiane Taubira en mars dernier.
François Hollande s'en est remis au Conseil national d'éthique qui doit rendre un avis sur la question fin 2013. Officiellement, le projet n'est pas abandonné. En déliant les sujets mariage et PMA, le Conseil constitutionnel ouvre cependant une porte de sortie au gouvernement pour proposer un nouveau texte.
Faut-il y voir un signe? En marge du déplacement du président de la République à Caen le jour de la décision des Sages, un de ses conseillers a reçu une délégation de l'Inter-LGBT à la préfecture du Calvados. En cette journée mondiale de lutte contre l'homophobie, leur entretien a porté sur le mariage mais aussi sur l'accès à la PMA aux femmes.